Mobilité durable en milieu rural : un réel impact pour les populations ?
En zone rurale, la mobilité est un défi au quotidien : transports en communs peu nombreux voire inexistants, infrastructures peu adaptées pour la pratique du vélo en sécurité, omniprésence de l’autosolisme rendent les déplacements compliqués voire impossible pour les publics les plus fragiles.
Le développement de solutions de mobilité inclusive et solidaire est une réelle bouffée d’oxygène dans ces territoires, en ayant un réel impact sur les déplacements du quotidien.
Quelles solutions pour quels territoires ?
La mobilité inclusive regroupe des multitudes de solutions, imaginées en complémentarité les unes des autres et pensées pour être accessibles au plus grand nombre. Le covoiturage, solidaire ou contre paiement, les navettes solidaires, la mise à disposition de véhicules, les permis solidaires … sont des exemples de solutions de mobilité inclusive. Toutefois, ces solutions prises de façon isolées ne toucheront qu’une partie des publics en situation de précarité. Il faut imaginer des ensembles de solutions, en capacité de couvrir une majorité des besoins.
En zone rurale, il est essentiel d’impliquer l’ensemble des acteurs institutionnels (collectivités locales, associations, organismes de l’insertion sociale…) pour identifier les zones blanches et les besoins des habitants. On le sait, le moyen de déplacement privilégié reste la voiture, le plus souvent parce que c’est le seul moyen accessible (10 millions de personnes en France n’ont pas accès aux transports en commun, selon l’UFC-Que Choisir !). Or le coût de possession et d’usage est élevé, et en cas d’impossibilité de conduire (pour cause de handicap ou d’âge), de nombreuses personnes risquent de se retrouver isolé·e·s ce que le sociologue Érick Le Breton décrit justement comme des situations "d’insularité autour de leur domicile".`
Sortir de l’isolement
Pour une personne âgée, l’arrêt de la conduite est le plus souvent non préparé et non anticipé. Il s’agit pourtant d’une perte sévère d’autonomie. Comment en effet faire ses courses, visiter son médecin ou maintenir le lien social quand il n’est plus possible de sortir de chez soi ? Quand le maintien à domicile est possible, il ne peut s’accompagner des seules visites des infirmières et auxiliaires de vie. Il est essentiel de proposer des activités sociales, pour éviter l’isolement et la baisse de qualité de vie, rendant inéluctable le placement en EHPAD.
Dans le cas d’un parcours d’insertion sociale, les déplacements sont indispensables pour honorer les différents entretiens, les formation essentielles pour acquérir un métier, et maintenir le lien social essentiel pour les loisirs et une vie quotidienne de qualité. Pour les réfugié·e·s, se déplacer permet aussi de faciliter l’intégration, l’appropriation de la langue et de la culture du pays d’accueil qui permet de s’insérer dans la société.
L’impact environnemental
Le déploiement de solutions inclusives et solidaires a aussi un impact sur l’empreinte carbone laissée par les déplacements. En développant les initiatives en faveur du covoiturage par exemple, on permet ainsi de mutualiser certains déplacements, “partageant” ainsi le coût-carbone entre les passagers. Même si les embouteillages sont plus rares en zone rurale, la réduction du nombre d’automobiles en circulation a aussi un impact sur le maintien en l’état des voies de circulation, et contribue à réduire les coûts d’entretien pour la collectivité.
Les marges ainsi dégagées peuvent ainsi permettre des aménagements de voirie pour développer des infrastructures telles que des pistes cyclables, permettant ainsi une pratique du vélo de manière sécurisée et levant un des principaux freins à la pratique en zone rurale. De même, le développement de solutions simples comme l’aménagement de points de prise en charge pour le stop organisé permet d’offrir des solutions de mobilité à faible coût environnemental et financier.
Communiquer pour changer les comportements
Un des aspects souvent négligé dans le déploiement de solutions de mobilité inclusive est la communication. Quoi de plus frustrant pour une collectivité que d’imaginer des solutions, les mettre en place sur le terrain et de les voir pas ou peu adoptées… parce que les habitant·e·s ne savent pas qu’elles existent. Il est essentiel de mettre en place des actions de communication ciblées, au plus près des habitant·e·s, en se déplaçant dans les villages, en informant, en impliquant les maires des plus petites communes.
Il ne faut aussi pas hésiter à “investir” les réseaux informels (groupes Facebook, discussions sur WhatsApp…) pour sensibiliser les habitant·e·s sur les solutions existantes, pour les interroger sur leurs attentes réelles et co-construire des solutions les plus adaptées possible. C’est une part du travail que COOPGO mène sur le projet de plateforme mobilité dans la vallée de la Roya, afin de sensibiliser le plus possible les personnes vivant sur ce territoire aux enjeux et faire connaître les initiatives développées pour la mobilité inclusive sur le territoire.
Des actions de communication bien ciblées, menées en concertation avec l’ensemble des parties prenantes, permettent de mieux comprendre les enjeux et de donner la possibilité aux habitant·e·s de s’en emparer et d’inciter eux-mêmes leur entourage à modifier leurs habitudes de mobilité.
En résumé
Le développement de solutions de mobilité inclusive et durable est essentiel pour sortir les habitant·e·s les plus fragiles de l’isolement et permettre de restaurer le lien social en zone rurale, tout en ayant un impact positif sur l’environnement et le pouvoir d’achat. De nombreuses solutions existent, et en adaptant les réponses aux spécificités des territoires, il est possible de réduire significativement la part de l’autosolisme et de rendre à nouveau possible les déplacements en zone rurale pour les personnes isolées.
Pour réussir le déploiement de telles solutions et faciliter leur appropriation par les usagers, il est essentiel d’impliquer les parties prenantes à tous les niveaux, et de faire connaître les initiatives prises au plus près des territoires concernés.